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  • Текст добавлен: 16 августа 2015, 16:30


Автор книги: Екатерина Энтина


Жанр: Политика и политология, Наука и Образование


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La profondeur stratégique

La capacité de réaliser telle ou telle décision ne fait pas encore un acteur international accompli de la nouvelle formation internationale, tant que celle-ci n’a pas de sa propre stratégie. Tant qu’elle n’a pas déterminé son propre avenir. Tant qu’elle n’a pas appris à user des instruments déjà disponibles pour se diriger étape après étape vers les objectifs qu’elle s’est assignés à long terme. D’ici là, les décisions concrètes appuyées par l’acteur international n’agiront pas d’une façon systémique sur le processus politique mondial. Elles ne feront pas la pluie et le beau temps. Son influence restera locale et fragmentaire.

L’exemple de l’Union européenne est significatif de ce point de vue. Depuis une longue date déjà, l’UE applique une politique internationale et une politique de sécurité commune. Elle élabore des méthodes et des procédures. Elle forme une culture politique particulière de concertation des intérêts et de réalisation du principe de la solidarité. Elle accumule l’expérience. Résultant notamment des dizaines d’opérations militaro-civiles et civiles à l’étranger. Ce n’est qu’une décennie après l’entrée en vigueur du traité de Maastricht, fondant l’UE, que l’intégration passe à l’étape de l’élaboration et de l’adoption de la stratégique correspondante. Tout au long d’une décennie elle reste encore purement déclarative sous de nombreux aspects.

Ce n’est que le Traité de Lisbonne qui donne du relief à la vision stratégique de la future évolution des activités extérieures de l’UE. Bruxelles met en place sa propre fonction diplomatique sous la forme du Service européen des actions extérieures pour lui déléguer une partie des pouvoirs exercés jusque là par les Etats membres, ainsi que par les Etats membres et par les institutions et les organisations de l’UE investis du pouvoir.

C’est un point de vue formel. Si l’on prend en considération l’influence réelle, de nombreux analystes doutent de l’efficacité de la politique extérieure commune, de la politique de sécurité et de défense de l’Union européenne. On lui reproche d’être chétive, mal articulée, sujette aux nationalisations sporadiques de tel ou tel secteur, etc. Ils mettent l’accent sur le fait que les Etats membres restent acteurs internationaux autonomes en ce qui concerne la politique extérieure. Bien sûr que ce point de vue a le droit de cité. Sans être tout à fait correct. En effet, l’UE est un acteur international du premier plan en ce qui concerne de nombreux points de l’agenda global (l’économie verte, le développement stable, le climat, la jurisprudence internationale, etc.). L’UE le définit. Elle entraîne les autres derrière elle.

Force est de constater que l’application du critère de la profondeur stratégique même à l’UE, qui semble être un acteur international accompli et universellement reconnu, ne donne pas de résultat indiscutable. Il est naturel que BRICS doive faire face aux difficultés de loin plus nombreuses.

BRICS manque de cohésion même en ce qui concerne la direction dans laquelle ce groupe doit avancer. Il est évident que les puissances qui en font partie aimeraient voir que les approches qu’elles défendent et les intérêts dont elles font la promotion soient mieux pris en considération dans la politique mondiale, elles se prononcent pour une révision du partage des pouvoirs, de la puissance, de l’influence et du bien-être en faveur des économies émergentes et au détriment des puissances qui ont dominé jusqu’ici. Par conséquent, l’affirmation des rapports internationaux plus équitables, plus égaux et plus réservés, le renoncement à l’action unilatérale et à la tendance pour imposer ses volontés au monde et pour entreprendre toutes sortes d’actions violentes en détour de l’ONU s’accorde mieux avec leur vision. Reste à savoir comment y arriver.

Pour ce qui est du nouvel ordre mondial, elles ont mal à s’entendre même au sujet de l’allongement de la liste des membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies et, éventuellement, en ce qui concerne la précision de l’étendue de ses pouvoirs. Le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud voudraient que BRICS se prononce pour qu’ils siègent en permanence au Conseil de Sécurité en qualité de leaders et de représentants des continents et des subcontinents correspondants. La Chine n’a rien contre à part la crainte que cela n’offre un prétexte à d’autres Etats importants pour prétendre au statut analogue. Or, la Chine veut éviter à tout prix de voir quelques unes de ces puissances au nombre des membres du Conseil de Sécurité. C’est la raison pour laquelle elle préfère se prononcer pour la préservation du statut-quo. Quant à la Russie, n’importe quelle variante l’arrangerait, en parole en tout cas, si les autres membres du groupe BRICS et l’ONU dans son ensemble arrivent à s’entendre. Moscou suit cette ligne à l’ONU depuis de longues années déjà.

Pour ce qui est de l’avenir de BRICS, les différences entre les opinions professées à l’intérieur même du groupe sont trop importantes. Moscou œuvre pour transformer BRICS en un acteur international actif, fondé de vastes pouvoirs dans toute la gamme des actualités internationales et globales, capable non seulement de discuter, mais aussi d’agir et de défendre les intérêts des pays engagés. Pékin se prononce également pour la consolidation de BRICS sous tous les aspects. Sur ce plan, la Russie et la Chine forment un pôle de BRICS, le second pôle étant constitué par le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud. Ils sont circonspects pour tout ce qui relève de l’institualisation et de la formalisation des activités. L’existence de BRICS en forme d’une structure informelle, d’une place de consultation et d’élaboration des nouvelles prises de positions dans l’arène internationale, mais aussi dans le cadre d’autres forums, les arrangerait.

Certaines nuances distinguent les attitudes adoptées par la Russie, par la Chine, par le Brésil, par l’Inde et par l’Afrique du Sud en ce qui concerne d’adhésion de nouveaux membres ou de l’engagement d’autres puissances sous telle ou telle forme dans les activités du groupe. Il est de notoriété universelle que tout un nombre de pays importants d’Asie, d’Afrique et d’Amérique Latine aimeraient devenir membres du groupe. Il existe des divergences entre les approches adoptées par les pays adhérents à l’égard d’autres aspects de l’évolution du groupe. Il est donc prématuré de prétendre que BRICS a sa propre vision stratégique de l’avenir et sa stratégie pour atteindre les objectifs que le groupe s’assigne.

Des progrès s’annoncent néanmoins sur ce plan. A l’occasion du sommet de New Delhi, la Russie a formulé l’initiative visant de fait à donner une dimension stratégique à BRICS. On peut prendre connaissance du passage correspondant de l’intervention du président russe sur le site www.kremlin.ru. Schématiquement, Moscou a formulé plusieurs idées de principe. Il voit l’évolution stratégique de BRICS comme la transformation de ce mécanisme de dialogue et de consultation en une institution de coordination sur toute la gamme des points relevant de ses compétences. Le cercle des thèmes débattus par BRICS s’étend. S’y ajoutent notamment la science, la culture, l’exploitation des sous-sols et la coopération pour surmonter les conséquences des fléaux naturels et des catastrophes technologiques. Un mécanisme des rencontres systématiques des représentants des pays chargés de la sécurité nationale, etc., doit être créé. Une stratégie de développement de BRICS doit être élaborée et approuvée. Elle comprendra les chapitres consacrés aux principes de fonctionnement du groupe, aux objectifs poursuivis, à ce qui rapproche et unit les pays adhérents.

Un trait positif témoignant du potentiel de consolidation de BRICS en qualité de l’un des principaux acteurs internationaux est à noter: le sommet s’est prononcé en faveur de la création d’un groupe de travail en vue de l’élaboration d’une telle stratégie. On peut s’attendre à ce que le premier croquis soit élaboré par la partie russe. Les pays du groupe n’ont nulle intention de trainer en longueur avec les négociations de concertation de ce document.

Dressons le premier bilan. A en juger d’après les quatre premiers paramètres, que nous avons choisis, BRICS est déjà devenu un acteur international de poids. Il en est capable et il se charge avec de plus en plus d’assurance de ce rôle. Son agenda est celui d’un acteur international. Il distingue les priorités des problèmes qui se posent devant la communauté internationale, et des objectifs à atteindre à partir des positions des Etats qui font partie du groupe, aussi bien qu’à travers le prisme du bien universel. Pour ce qui est de sa capacité de prendre les décisions d’importance globale et de leur réalisation, c’est-à-dire de l’utilisation de la puissance réunie des pays qui en font partie pour atteindre les objectifs communs, BRICS a fait de notables progrès dans la voie de sa transformation en acteur international. Mais pour ce qui est de la profondeur stratégique de ses activités, le groupe n’est qu’au début du chemin.

La vision changeante de BRICS

Il est déjà un fait que BRICS avance vite dans la voie de sa transformation en une nouvelle force politique dans l’arène internationale d’après la série des paramètres évoqués ci-dessus. Il faut pourtant que tout le monde considère BRICS comme un acteur international influent pour que le groupe soit capable de mettre en valeur son potentiel. Il pourra faire un bond qualitatif dans ce cas.

Il est une chose quand tu dois te débattre péniblement pour arriver à tes objectifs et quand les autres ne t’écoutent que dans le cas où ils n’ont pas d’autres choix. Il en est une chose différente quand on t’invite avec insistance à t’asseoir à la table. Quand on a besoin de toi. Quand on te fait la cour. Quand on te fait la place, pour que tu puisses assumer une partie de la responsabilité de l’avenir de l’économie et de la politique mondiale.

Sur ce point, les élites politiques des Etats Unis et de l’UE, ainsi qu’une partie importante des experts qui se rangent sous leurs bannières, ne sont pas pressés de changer d’avis. Ils sont sceptiques à propos de la crédibilité de BRICS et ils ne se lassent pas de le faire savoir à chaque fois qu’une occasion se présente.

Cette attitude a été exprimée de la façon la plus conséquente dans le rapport sur BRICS et sur la politique recommandée à l’Union Européenne à l’égard de la Fédération de Russie en tant que pays engagé dans le groupe, qui a été élaboré par le Conseil de l’UE pour la politique extérieure (l’ex Conseil britannique pour la politique extérieure). Le rapport est très inspiré. Bien fondé. Il est richement argumenté, s’appuyant sur des statistiques, sur des tours d’horizon rédigés par d’autres centres analytiques.

Le verdict est sévère et il est décourageant pour BRICS et pour la Fédération de Russie. Les auteurs tranchent sans appel. Ils prouvent que BRICS est une formation artificielle et incapable de subsister. Les puissances qui en font partie sont trop différentes du point de vue de leurs régimes politiques, du niveau de développement économique, de leur identification nationale, etc.

La différence des intérêts qu’elles défendent est si importante qu’elles sont vouées à être en concurrence entre elles plutôt que coopérer et collaborer entre elles. C’est la raison pour laquelle BRICS aura inévitablement trop de peine d’aboutir aux approches communes. Même s’il le réussit, cela ne dépassera pas le stade des généralités et des déclarations. Sans jamais aller plus loin. Il n’est pas possible d’édifier une unité fondée uniquement sur l’opposition vis-à-vis de l’Occident organisé.

Qui plus est, BRICS est tissé des contradictions. Celles-ci existaient dès le début. Et elles sont toujours là. On ne saura pas les surmonter. Moscou a terriblement peur de l’expansionnisme chinois. Le Kremlin fait les cauchemars dans lesquels il cède une partie de Sibérie et de l’Extrême Orient après l’autre. Les maîtres du Kremlin se réveillent baignant dans la sueur froide. De quel partenariat réel et encore moins d’une alliance peut-il être question dans cette situation?

L’Inde et la Chine sont des adversaires plutôt que des alliés. Le souvenir de la confrontation militaire qui les a ébranlées ne s’est pas encore effacé. Le litige territorial n’est jamais réglé. L’Inde et la Chine ont à accéder aux mêmes marchés, et aux mêmes ressources. Les guerres de commerce les attendent encore. Et en plus, la Chine soutient par tous les moyens l’adversaire régional principal de l’Inde, à savoir le Pakistan.

Le Brésil, l’Inde et la Chine sont en train d’édifier les sociétés diamétralement opposées. Quant à l’Afrique du Sud, elle a été invitée à BRICS juste pour donner plus de poids géopolitique. Aucune autre raison ne l’explique. Du point de vue de l’échelle de son économie l’Afrique du Sud est loin derrière pour qu’on puisse en faire une pierre angulaire.

Mais ce n’est pourtant pas l’Afrique du Sud qui est le maillon faible de BRICS, mais la Russie. Les autres procèdent aux réformes structurelles, ils avancent d’un pas assuré dans la voie de rattrapage économique, améliorent leurs indices sociaux et économiques, connaissent un développement rapide et dynamique, deviennent de plus en plus compétitifs sur les marchés mondiaux. Par contre, l’économie et le régime politique de Russie sont en permanence en état de stagnation, sa compétitivité internationale est en baisse. Elle se transforme en fournisseur des matières premières de l’UE et de la Chine. Son avenir n’est pas enviable. Les Etats Unis et l’UE doivent se fonder sur ces constatations en choisissant la politique à appliquer par rapport à la Russie et à BRICS dans son ensemble.

Nous voyons ici une spéculation fondée sur d’autres spéculations, une exagération s’appuyant sur d’autres exagérations. Le silence absolu est fait sur les facteurs objectifs évoqués plus haut. Impossible de ne pas le voir. Mais ce n’est que sur le papier que l’on arrive à passer ses souhaits pour de la réalité. La vie réelle exige d’autres principes d’approche.

Si ce rapport était publié fin 2008-début 2009, il aurait eu du succès. En tout cas, il serait passé pour un ouvrage crédible. Mais la situation a changé substantiellement depuis lors. Les recommandations formulées par ses auteurs ont été accueillies avec méfiance aux nombreux débats engagés dans les capitales européennes. C’est symptomatique.

Une logique différente l’a emporté. Pourquoi se tromper. A quoi bon. Au nom de quoi doit-on se laisser bercer. Les évaluations sceptiques de l’avenir de BRICS et des puissances qui en font partie, les critiques au sujet des faiblesses, des retards, des contradictions internes qui leur sont propres peuvent être justes sous de nombreux aspects, soit, mais ce n’est qu’une face de la médaille.

L’autre face de la médaille est celle de la crise prolongée subie par les pays industrialisés qui ont intérêt à établir des rapports de partenariat plus étroits avec les membres du nouveau groupe et avec BRICS dans son ensemble. Il faut se rapprocher et engager une coopération plus profonde et pas au contraire.

Autrement dit, une partie des experts américains et européens propose par inertie à leurs élites une vision dépassée de BRICS, qui s’accorde mal avec la réalité. Mais les élites commencent à se rendre compte que cette approche est bornée et stérile. Elles constatent qu’elle méconnaît les processus en cours dans le monde, qui vont dans les directions variées. Qu’elle ne s’accorde pas du tout avec la dynamique de développement de l’économie mondiale.

La puissance économique, technologique, d’innovation des anciens centres de force est toujours là. Personne n’en doute. Mais ils faiblissent relativement. Les changements ne peuvent pas être négligés. Et on ne saura pas les négliger. Il est parfaitement naturel dans cette situation que l’on se mette sérieusement à chercher les réponses à la question de savoir pourquoi cela arrive, et qu’est-ce que les anciens centres de force font mal, quelles erreurs ont – ils commis, où sont les avantages concurrentiels des pays de BRICS et du groupe lui-même, pour quelle prise de position doit-on opter à leur égard.

Le fait même que l’on se pose ces questions témoigne déjà que l’arrogance des Etats-Unis et de l’UE par rapport à BRICS commence à disparaître. L’idée qu’ils tiennent en mains toutes les commandes, que tout dépend d’eux, que seulement les solutions qu’ils proposent sont correctes et prometteuses, appartient désormais au passé. La vision du monde d’après laquelle les pays industrialisés servent d’étalon, et que tout le monde doit s’appliquer à correspondre à cet étalon devient de plus en plus discutable et vulnérable. La rhétorique perd petit à petit de son acuité. La réaction de Washington, de Bruxelles et d’autres capitales face au bilan du sommet de New Delhi en dit long à ce sujet: les médias mondiaux et les communiqués officiels en on parlé en termes respectueux.

Un nouveau discours politique se substitue à l’ancien. Il se résume comme suit: tiens, vous voyez que BRICS et les pays qui en font partie ne vont pas mal. C’est particulièrement évident sur la toile de fond des problèmes extrêmement compliqués auxquels se heurtent les Etats-Unis, le Japon et l’Union européenne. Les phénomènes de crise qu’ils subissent sont très difficiles à surmonter. Depuis une longue date, ces pays ont mené un train de vie plus large qu’ils n’auraient du se le permettre. Ils sont en retard sur les réformes structurelles, systémiques et autres sociaux-économiques. Ils se sont trompés en croyant qu’ils ont tout réussi, qu’ils sont imbattables. Par contre, les stratégies de développement choisies par BRICS et par ses membres se justifient. Ces stratégies comprennent des éléments qui peuvent s’avérer utiles pour les pays industrialisés. Quoi qu’il en soit, il faut les examiner, les étudier, les sonder. Les emprunter le cas échéant.

Ces discours mûrissent d’abord au niveau des échanges d’opinions. Ils témoignent seulement de l’état d’esprit en formation chez l’opinion publique. Ils commencent à se transformer en actes à présent. On voit apparaître partout en Europe et ailleurs des centres d’étude de BRICS. Le thème de BRICS s’installe dans les programmes d’études. Des groupes de travail se créent pour étudier tous les aspects des activités et de l’évolution de BRICS et de ses adhérents.

En voici un exemple concret: les projets d’études sur les thèmes liés à BRICS sont inscrits sur le programme septennal des études théoriques de l’Union Européenne qui seront réalisés sous le patronage direct de la Commission européenne et du Service européen des actions extérieures. C’est dire que des millions de dollars et d’euros sont dépensés pour étudier BRICS. Or, les Américains et les Européens n’ont pas l’habitude de jeter l’argent par les fenêtres. Personne se sera payé pour on ne sait quoi.

Les changements dans la politique réalisée par l’Union européenne et par les Etats-Unis témoignent également que les idées qu’ils ont de BRICS évoluent. Bien que l’UE et les USA suivent une ligne politique concertée sous de nombreux aspects dans l’arène internationale, une concurrence aiguë s’annonce entre eux en ce qui concerne l’établissement des rapports privilégiés avec BRICS et avec les pays qui en font partie.

Quoi que Washington ne déclare, quelles que soient ses faux-fuyants, il mise sur les efforts pour contrer BRICS et les pays qui en font partie. Washington cherche à fonder son jeu sur les contradictions qui existent entre les pays de BRICS, une partie desquelles a été évoquée plus haut.

Bruxelles s’assigne un objectif complètement différent: il a des intérêts colossaux dans les pays de BRICS, tandis que son influence dans ces pays est pratiquement négligeable. C’est la raison pour laquelle il est de première importance pour Bruxelles de consolider le dialogue politique avec ces pays, d’accorder à tous les pays de BRICS le statut de partenaire stratégique, de faire de son influence économique un outil politique efficace.

Conscient du fait que les instruments d’influence sur les pays et sur le groupe BRICS dans son ensemble lui manquent, il s’applique à créer les mécanismes qui l’aideraient à faire valoir dans d’autres régions du monde l’expérience d’intégration européenne, à faire accepter universellement son modèle comme normative.

Le fait que d’autres projets de développement transrégional et mondial fassent le jour pour faire concurrence est un témoignage de plus que BRICS est pris de plus en plus au sérieux en qualité d’acteur international. L’accélération des processus d’intégration régionaux qui entravent la pénétration sur les marchés régionaux des sociétés des pays tiers sert de toile de fond générale.

L’idée de Washington de mettre en place une communauté de libres échanges dans le Pacifique à une régulation de loin plus stricte qu’il ne soit acceptable pour les membres asiatiques de BRICS est le projet contraire le plus évident. Le projet d’une communauté économique du Japon, de la Chine et de la Corée du Sud est très intéressant et prometteur du point de vue de la restructuration de l’ensemble de l’économie et de la politique mondiale.

Le fait que des projets qui vont si loin apparaissent est particulièrement symptomatique. Aucune preuve de plus ne s’impose. Les prises de position à l’égard de BRICS, adoptées par les pays tiers et par les centres d’influence évoluent sérieusement. Le groupe est considéré de plus en plus souvent comme un partenaire ou un concurrent dont la force est en croissance. On propose donc des concepts variés d’intégration politique et économique de BRICS dans la politique mondiale et de révision des rapports avec BRICS et avec ses membres. Quelques uns de ces concepts se traduisent déjà au niveau de la réalisation pratique d’une politique.


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