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Автор книги: Андрей Андреев


Жанр: Зарубежная образовательная литература, Наука и Образование


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21. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg, entre le 7 et le 13 juillet 1803]1


Sire!

Me voici de nouveau en esprit vis-à-vis de mon Bienfaiteur chéri. J’en ai besoin pour me consoler des contradictoires et longueurs toujours renouvelées que je survis dans mes négociations. Peut-être ai-je tort de supposer en d’autrui une partie de la vivacité qui me consume. Mais quand se fera le bien?

Après tant de discussions il reste un point sur lequel je ne puis m’en rapporter au jugement de la Commission à moins de trahir mes devoirs, le point des 10,000 Rbl. pour les pensions. D’abord après avoir trouvé la chose bonne en soi on me l’avait refusée uniquement parce que l’on voulait trouver les 6000 Rbl. qui manquent pour la Commission des écoles du département de Dorpat2. V. M. trouvant injuste de nous charger de ces frais auxquels on ne pensait pas lors de l’acte de fondation et pour lesquels on a augmenté les revenus des autres universités russes, et ayant bien voulu me promettre de réparer cette injustice, je croyais toutes les difficultés levées. Non, il s’est trouvé une autre objection – la rivalité des universités russes.

Sire! Je ne m’étonnerais pas du tout que Vous crussiez que je fais ici la satyre non l’histoire de mes négociations. Vous ne pourrez pas croire que, nos revenus étant fixés, on nous en défende un emploi sage et prévoyant, qui met à l’abri des événements et inocule à l’Université un principe d’agrandissement futur, un emploi qui assure à nos descendants des ressources que nous nous refusons à présent malgré notre désir brûlant de donner à notre Université tout le lustre possible. Vous ne concevez pas, dis-je, que l’on nous défende cet emploi de peur que nous ne gagnions par là sur les universités russes. Mais que direz-Vous, Sire, lorsque Vous apprendrez que le noble Novossilzof, à qui je dois presque tous mes succès, à qui notre brave athlète Klinger doit tant de victoires, que Novossilzof est un des fauteurs principaux de cette objection?

J’ai percé au travers de cette feinte, j’ai senti que son dessein était de procurer le même avantage aux autres universités, et sur le champ j’ai proposé ouvertement ce que lui comme membre de la Commission ne pouvait guère proposer, et il n’a pas manqué de m’appuyer. Mais pour cela il eût fallu changer l’état prescrit des universités russes, peut-être abandonner des idées favorites qui feront la ruine de ces établissements, il eût fallu annoncer qu’on a fait des constitutions sans connaître à fond la nature de la chose.

Sire! Quand le Comte Savadofsky Vous présentera nos Statuts, daignez Vous souvenir de ce point au chapitre de l’État, et veuillez exiger que le Ministre insère l’article des pensions tels que je l’ai demandé. Par là Vous rendez un service non seulement à Dorpat mais à toutes les universités de l’Empire, et un très grand service. Par là Vous les autorisez à des réclamations sur leur état et ces réclamations mèneront à une révision absolument indispensable de toute leur constitution viciée par l’esprit de fabrique qui y règne. Cet esprit de fabrique est là le vrai ennemi des universités russes; c’est lui qui en fera des établissements en sous-ordre infiniment inférieur à celui de Dorpat, c’est le ver qui minera leur grandeur future, qui réalisera les craintes pusillanimes que l’on prise dans ma prétendue ambition et dans ma prédication pour Dorpat. Vous savez, Sire, si je m’intéresse à la nation russe. Quand mes principes ne m’en feraient pas la loi, mon cœur me la ferait; c’est Votre nation. Mais laissez-moi la douce vengeance de ne pas les tirer d’erreur. Que ces idées soient utiles à la Russie et que jamais la Russie n’apprenne que j’y ai eu part.

Le Ministre présentera un autre objet au jugement de V. M., l’explication du § 16 de l’acte de fondation qui exempte de quartiers militaires les maisons habitées par des professeurs. Le Magistrat de Dorpat, qui ne manque jamais une occasion de nous persécuter, répartit sur les maisons habitées par les professeurs des impositions pour les quartiers militaires, et le Ministre prétend qu’il a raison, comme s’il était possible de faire payer une imposition en argent pour une chose qu’on ne doit pas en nature. Permettez-moi, Sire, d’ajouter à cette remarque qui fixe déjà l’explication du § 16, les motifs qui lors de l’acte de fondation me firent demander ce §. Il s’agissait de procurer des loyers moins exorbitants aux membres de l’Université; si au lieu des quartiers militaires on impose les maisons, les loyers seraient-ils à meilleur marché? Je le sais, Sire, tout privilège est en soi une injustice contre la commune. Mais l’État accorde des privilèges avec raison dès qu’il procure au même temps à la commune des avantages plus considérables. Or, Sire, la ville de Dorpat jouit par l’université d’avantages immenses; non seulement d’avantages intellectuels, mais surtout d’avantages de finance. Une circulation annuelle de 160,000 Rbl. au moins, la vivification des arts et de métiers, l’augmentation presque doublée des loyers ne balanceraient-ils pas l’exemption de 28 domiciles de professeurs? Par l’établissement de l’Université la totalité des maisons de Dorpat rapporte presque le double d’auparavant, et l’on crie de perdre quelques centaines de Roubles pour nos logements! Sire, jugez à présent s’il était injuste de demander que cette prérogative s’étendit aux autres personnes de l’Université, et permettez-moi de réitérer cette demande pour ces pauvres gens qui en ont encore plus besoin que les professeurs, et que le Magistrat de Dorpat apprenne par cet exemple que chicaner autrui c’est se faire tort à soi-même. Sans rien changer à l’acte de fondation cette extension peut avoir lieu au § 14 des Statuts que le Ministre présentera à la sanction de V. M.

Sire, si je voulais imiter ceux qui dénient à Dorpat la constitution qu’elle veut se donner, ne pourrais-je pas Vous faire souvenir qu’à toutes les autres universités de la Russie, toutes les personnes attachées à l’université sont logées gratis3. Elles le sont à Wilna et à Moscou; pour Charkov on construira des bâtiments énormes à cet usage, les fonds y suffisant. Nous seuls n’avons pas cette prérogative qui à Dorpat fait une différence de 5 à 6 cents roubles de revenus, à Dorpat où d’ailleurs tout est si cher.

Dans le langage ordinaire, j’encours, Sire, Votre disgrâce en Vous fatiguant ainsi par le tableau des choses à vue. Mais à quoi me serviraient Vos bonnes grâces si elles ne me donnaient ce droit-là? Vous taire des vérités que je Vous dois, ménager la confiance dont Vous m’honorez pour mon avantage particulier, ce serait trahir indignement l’intérêt de l’humanité auquel je suis voué par goût et par ma place. Non, Sire, je Vous le jure, Vos bontés ne me corrompront jamais.

22. G. F. Parrot à Alexandre IER

Saint-Pétersbourg, 14 juillet 1803 1


Sire!

Me voilà enfin forcé, malgré tous mes efforts pour le contraire, à en appeler à l’autorité de Votre Majesté, à mettre en lutte directe le bien public et le Comte de Savadofsky. Je n’ai rien oublié de ce qui pouvait ramener le Ministre de ses erreurs; j’ai cru y avoir réussi pour la plus grande partie. En cédant de part et d’autres, la commission générale de l’instruction publique, le Ministre et moi sommes enfin venus à bout de fixer article pour article les Statuts de l’Université de Dorpat, qui déterminent sa forme intérieure et sa marche, jusqu’à ce que l’expérience dévoile des défauts à corriger2. Tout est fait avec l’approbation apparente du Ministre et je m’applaudissais d’avoir réussi de son gré. Lui-même a corrigé de sa main la seconde moitié de cet ouvrage et à présent il se défend de le signer comme conforme à ses intentions pour être présenté à Votre sanction. Son but est de m’impatienter, de me forcer à quitter Pétersbourg sans mes Statuts, pour qu’après mon éloignement il puisse braver la saine raison et inoculer ses propres erreurs à la constitution de notre Université.

Sire, je ne viens point ici défendre sourdement une cause obscure: nos Statuts, tels que nous les avons faits, tels même qu’ils sont encore, après les corrections que mon amour pour la paix m’a engagé à céder, sont l’orgueil de notre Université. L’élite de nos professeurs en les composant n’a pas perdu un seul instant de vue le bien public, Vous et la postérité.

Qu’oppose le Ministre à mon désir de terminer enfin? Des défaites qui excuseraient à peine le moindre défaut de convenance: l’indisposition de sa femme! Voilà comment il traite la partie importante du bien public remise en ses mains. Quand on le presse il trouve toujours qu’il est temps encore, et bientôt l’instruction publique sera traitée comme la législation3. Jetez, Sire, un coup d’œil sur le département de l’instruction. Où en sont les universités russes que Vous vouliez donner à Votre patrie gémissante sous le fardeau de l’ignorance, en dépit des efforts et des sacrifices que Vous faites pour l’en délivrer?

Sire! au 1er d’Août commence notre semestre. Il doit se commencer avec ordre. L’anarchie doit cesser enfin; l’autorité personnelle du Recteur doit faire place à des lois décisives; l’Université entière, mon successeur surtout implorent cette grâce4. On la leur doit. Nous avons attendu jusqu’au dernier instant pour laisser au Ministre tout le loisir possible. Je n’ai plus que quinze jours jusqu’à l’ouverture du semestre, et combien de choses me restent à faire! L’impression des Statuts et des lois pénales, l’immatriculation des nouveaux étudiants, une partie de leur examen, la révision générale de toute mon administration pour remettre les affaires à mon successeur, mon discours à composer, la préparation à deux cours de physique etc. Et mes jouissances avec ma famille! Sire, après une année telle que je l’ai eue, après être devenu, pour ainsi dire, étranger à ma femme et à mes enfants, j’avais le droit de leur promettre de passer quelques jours avec eux au sein du bonheur domestique, de redevenir père et époux. L’apathie du Ministre m’a déjà privé de cette jouissance; ma femme et mes enfants soupirent en vain après mon retour. Ils n’ont de mes travaux et de mes devoirs que l’amertume qui y est attachée, moi seul en ai les jouissances, et cette idée en corrompt la douceur.

Sire! Je demande justice. Puisque ni le bien public ni mes raisons ne peuvent inspirer au Ministre de l’activité, que l’autorité lui en donne! L’honneur national y est intéressé plus encore que le bien de l’Université de Dorpat.

Parrot,

Recteur

23. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg, à la veille du 8 août 1803]1


Sire,

Je connais Votre malheur domestique2; je partage Vos peines et me reproche amèrement la nécessité cruelle où je suis de me plaindre en ce moment du Comte Savadofsky. Vous savez, Sire, combien le prolongement de mon séjour ici me fait négliger de devoirs, et il y a trois semaines que j’ai terminé l’affaire de nos Statuts avec la commission générale! Lorsque ces Statuts furent remis au Ministre pour les présenter à la sanction de V. M. le Général Klinger le conjura de ne pas tarder, en lui alléguant les raisons pressantes que j’avais de m’en retourner. Quelques paragraphes qui, faute de temps, n’avaient pas être discutés définitivement avaient été remis aux soins du Ministre, qui les régla quelques jours après avec mon collègue et moi. L’affaire était donc faite. – Non; il la garde encore, y apporte quantité de changements, à mon insu, à l’insu de la Commission. Enfin dimanche dernier je crus tomber au terme; l’on me remit l’original allemand: j’y trouve les nouvelles corrections.

Après avoir consulté Messieurs Novossiltzoff et Klinger, je me décidai par amour de la paix, pour pouvoir enfin quitter Pétersbourg, à ne point faire de protestation dans l’espérance de faire changer à la suite par quelques lois particulières les fautes de logique que le Ministre inocule à notre ouvrage. Cette modération n’a servi à rien, et j’apprends qu’il en est à de nouvelles corrections, et que les lois pour des étudiants et les lois de notre commission des écoles vont subir le même sort. Tout notre travail portera l’empreinte de son génie.

Sire! que faire? Il a si bien pris ses mesures qu’il est même presque impossible de lui démontrer ses torts; il a négligé dans les séances toutes les formes qui pouvaient servir à donner de la stabilité aux décrets de la Commission. Il n’est qu’un moyen de terminer en peu de jours: c’est de redemander au Comte Savadofsky tous mes papiers et de charger Messieurs Novossiltzoff et Klinger de l’examen de toutes mes affaires, comme lors de l’acte de fondation3.

Sire! daignez le faire; sans cela ce semestre est perdu pour nous et le bien public. Après tant de soins, de sacrifices, de travaux de Votre part, Vous avez en vérité le droit de vouloir enfin posséder dans Vos vastes États au moins une université complètement réglée.

24. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg, 15 septembre 1803]

Dimanche matin à V heures 1.


Sire!

Puisque les circonstances ne veulent pas que <puisque j’ai dû passer ici plus de deux mois> pendant les 3 longs mois que j’ai passé ici j’aie le bonheur de Vous voir encore une fois avant mon départ, il ne me reste que ce moyen de satisfaire au besoin de mon cœur. L’Université de Dorpat Vous doit ses actions de grâces pour les bienfaits que Vous venez de lui accorder, et elle s’en acquittera avec les sentiments d’une fille reconnaissante. Moi je Vous dois des actions de grâces pour la manière dont Vous nous les avez accordés. Homme si digne d’être chéri! Recevez-les; ils partent d’un cœur qui Vous aime au-delà de toute expression. À présent que je quitte Pétersbourg et les affaires de tout genre pour rentrer dans ma carrière d’homme de lettres j’aurai moins souvent l’occasion de Vous parler de ce sentiment profond que Vous m’avez inspiré, et quand même l’occasion s’en présentera, ce fera une voix sans écho. Les mêmes raisons qui m’ont ravi les délices de Vous voir, me frustreront de Vos réponses2. – Sûr au reste que malgré le tourbillon des affaires et de Vos alentours il viendra quelquefois des instants où mon souvenir se retrouvera vivement à Votre mémoire, je pourrai peut-être me consoler d’être sous tant de rapports éloigné de Vous. Mais j’ai une prière à Vous faire. Que ces instants soient pour Vous des moments de recueillement! Sortez alors du tourbillon, rentrez dans la solitude du sentiment. Songez à l’amitié, songez surtout aux vertus domestiques3. Ne Vous lassez pas de Vous les approprier toutes. N’en croyez pas aux sophistes qui les regardent comme inutiles en parti sublime que Vous occupez. Elles sont la base de toutes les autres vertus. Elles décident de toute notre moralité parce que c’est sans cesse que nous abhorrons ou foulons aux pieds les devoirs qu’elles nous imposent. Elles exercent sur nous l’empire irrésistible de la coutume. O mon Alexandre! Saisissez-Vous de ce levier puissant des grandes actions, et si Vous l’avez déjà en main, regardez-le comme le plus précieux trésor que Vous possédiez. L’ami même, l’ami le plus dévoué, le plus sincère ne l’égale pas.

Tels sont mes adieux – pour longtemps. Soyez heureux, dans le sens sublime que j’attache à ce mot, et que le ciel conserve longtemps à la terre le monarque heureux de la Russie.

Parrot


P. S.

Novossiltzoff Vous remettra ces jours-ci un petit traité de moi, de la publication duquel j’espère quelque utilité. Il est déjà en russe4. Vous êtes si prompt à récompenser que je crois devoir Vous rappeler notre convention tacite. Il n’existe pour moi qu’une seule espèce de récompense, et Vous en avez déjà trouvé le secret. Vous l’avez si bien exercé!

25. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat, octobre 1803]1


Sire,

L’aristocratie, qui a juré la perte de Votre Université de Dorpat, relève sa tête altière et rassemble de nouveaux orages contre nous. Elle a réussi même à fasciner les yeux de notre brave Klinger, qui, à force de vouloir être impartial, devient injuste envers ses meilleurs amis.

Le procès, d’ailleurs si simple du conseiller de collège Spalkhaber, est l’étendard qu’on déploie, et Votre Majesté aura été sûrement instruite indirectement de cette affaire. Sire! Mon devoir est de Vous en instruire directement, en attendant la fin de ce procès dont les pièces motiveront sans doute des représentations officielles de l’Université.

Vous savez, que la vérité est la déesse à laquelle je sacrifie journellement. D’ailleurs je ne suis ni Recteur, ni membre du tribunal qui a conduit jusqu’ici l’affaire en question. Je suis simple spectateur sans intérêt personnel en ceci. Si cependant il se trouvait que je Vous aie trompé, si les actes de ce procès me donnent le moindre démenti, je me soumets personnellement à Votre disgrâce, et à toute la rigueur des lois. Vous savez, Sire, ce que j’attache à ce mot Votre disgrâce. Aucun mortel ne Vous aime comme moi.

Des bruits publics accusaient Spalkhaber d’avoir diffamé la réputation de deux de nos professeurs <en accusant l’un d’avoir été trouvé mort ivre dans la rue, l’autre d’avoir dû être transporté chez lui pour même cause. Je ne veux point parler des doutes qu’on pourrait former contre ce caractère moral de l’homme qui se trouvait accusé des calomnies.> Les professeurs avaient méprisé ces bruits. L’accusé ne méritait pas notre attention. Les étudiants outrés par cette calomnie veulent laver la réputation de leurs professeurs et envoient cinq d’entre eux demander à Spalkhaber s’il a publié cette calomnie ou non. Peu satisfaits de sa réponse ils se retirent. Spalkhaber prétend que les étudiants se conduisirent tumultuairement à cette occasion, sans avoir encore pu le prouver. Il porte plainte au Recteur qui est forcé d’ajourner l’instruction de ce procès parce que le lendemain et surlendemain il y avait séance de la chambre des finances pour la reddition des comptes au Curateur et séance pressante de la commission des écoles. Daignez, Sire, ne pas oublier que le Recteur de notre Université est chef de 9 tribunaux et comités qui vont tous de pair sans compter la clinique de l’Université et les leçons qu’il doit donner comme professeur de médecine2. Des pareils travaux multipliés sans cesse par la guerre presque universelle que nous avons à soutenir doivent assurément excuser un délai de 3 jours si ordinaire dans d’autres tribunaux qui n’ont qu’un seul genre de travail. Pendant cet intervalle les étudiants se rassemblent en plein midi et portent à Spalkhaber un pereat devant sa maison à la proximité du corps de garde. Le Recteur, ayant été averti de cet excès par une dénonciation de Spalkhaber, présente la chose au tribunal de l’Université, parce qu’elle passait sa compétence. La dénonciation portait qu’en outre on avait cassé une vitre et on accusait un des étudiants en particulier. Elle se terminait par exiger que les coupables fussent incessamment livrés aux tribunaux criminels. Le tribunal de l’Université qui trouvait dans les Statuts des étudiants § 34, une loi précise contre les insultes faites à des particuliers, et un § 30 contre la polissonerie commise en public, crut à juste titre que le cas était de sa compétence, et non de celle des tribunaux criminels, récuse la dénonciation en invitant le dénonciateur à porter une plainte ordinaire pour obtenir satisfaction. Au lieu de le faire, Spalkhaber insulte à deux reprises par écrit le tribunal et tout le conseil de l’Université, et récuse en général la compétence de l’Université. Le tribunal le condamna pour ce manque d’égard à une amende de 20 Roubles. Peu après Spalkhaber se décide à reconnaître la compétence de l’Université, porte sa plainte qui est d’abord reçue. Le tribunal est occupé à l’examiner selon toute la rigueur de la loi. Mais il ne s’agissait pas seulement d’un délit contre un particulier, le général qui commande à Dorpat notifie que le pereat porté en présence du corps de garde est un manque de respect envers la garde. Le Recteur punit à cet égard les coupables en présence d’un témoin requis par lui et envoyé par le général qui déclare être plus que satisfait. Ainsi l’Université a donné la satisfaction publique et est occupée de prouver la satisfaction privée que Spalkhaber tienne en longueur en voulant aggraver le délit sans fournir de preuves.

Voilà ce qui s’est passé à Dorpat. Tout y est dans l’ordre requis. La scène change à Pétersbourg. Spalkhaber porte des plaintes au Gouverneur Général de la Livonie3. Le Gouverneur Général, sans examiner si la chose est de sa compétence, sans s’informer si l’Université a eu des raisons d’agir ainsi, sans savoir à quel tribunal une chose pareille ressort, prescrit par le Curateur à l’Université le jugement qu’elle doit rendre. Le Curateur exige que l’arrêt qui condamne Spalkhaber soit biffé des registres du tribunal.

Tout pêche en ce qui a été fait à Pétersbourg. L’affaire concernant la satisfaction privée est une affaire purement judiciaire. Or en toute affaire judiciaire personnelle ou réelle le § 6 de l’acte de fondation et le § 154 et 155 des Statuts de l’Université portent qu’on appelle du tribunal de l’Université au Conseil de l’Université et de celui-ci au Sénat de l’Empire. En outre un Ukase de V. M. elle-même (dont la date m’est échappée) défend à toute personne de marque ou même au supérieur de dicter à des tribunaux de justice les arrêts qu’ils ont à rendre, et malgré cela le Gouverneur Général dicte au Curateur de l’Université l’arrêt qu’il doit faire rendre par notre tribunal. J’ignore, Sire, jusqu’à quel point un Gouverneur Général peut étendre ou resserrer les limites de son autorité, mais cette extension ne pût assurément pas se faire au mépris de tant de Imanoï-Ukases.

Ainsi Spalkhaber devait accepter d’abord le droit de porter plainte, attendre la décision du tribunal, en appeler s’il le voulait à notre conseil, puis au Sénat de l’Empire. Sire! dans un cas infiniment plus grave, où le coupable a insulté formellement par écrit le Recteur et toute l’Université, repoussé le Militaire de V. M. en ameutant la populace, séduit les étudiants à la révolte contre leurs supérieurs, nous attendons en vain depuis un an la première sentence du tribunal inférieur d’où ressort le coupable4. Et dans une affaire de bien moindre importance, où la satisfaction publique a déjà été donnée par une punition exemplaire on fait à notre Recteur écrasé de travaux un crime d’un délai de 3 jours au nombre desquels se trouve encore un dimanche!!! Nous avons puni sur le champ nos étudiants pour avoir commis un excès, non contre le militaire, mais simplement en sa présence, tandis que le crime d’ameuter la populace contre le militaire n’est pas encore puni par d’autres tribunaux. Nous sommes prêts à punir une étourderie de jeunesse contre un homme que le public accuse d’avoir provoqué l’offense, qui s’est permis plusieurs faussetés évidentes dans sa plainte, mais le coupable qui a ameuté notre jeunesse contre ses supérieurs hue depuis un an l’Université et se rit de ses efforts pour obtenir justice. Sire! Voilà l’équité que l’Université éprouve des gouverneurs généraux et des tribunaux.

Enfin ce que l’on avance de plus plausible contre l’Université est que le tribunal a condamné Spalkhaber à 20 Roubles d’amende (au profit des pauvres) pour le ton insolant qu’il s’est permis contre le juge auquel il avait recours. On prétend que Spalkhaber ne ressortant pas de la juridiction de l’Université ne peut en être puni. – Sire! Si un tribunal insulté par un particulier ressortant ailleurs devait porter ses plaintes à un autre tribunal, tout procès civil entre particuliers deviendrait un procès injurieux entre le tribunal et celle des parties qui jugerait à propos de l’insulter et il n’existerait plus de respect envers le tribunal. Aussi les lois de tous les pays, notamment celles qui ont vogue en Livonie, le droit romain, les lois suédoises, livoniennes et russes exigent que le délinquant soit puni sur le champ par le tribunal offensé, sauf à lui à chercher recours après coup contre le tribunal. Il y a même davantage: l’ordonnance de Pierre Ier affichée sur le miroir des juges5 porte peine contre les juges qui négligent ce devoir, et qu’on ne prétexte pas ignorance, un second Ukase affiché sur le même miroir des juges ordonne que cet Ukase soit ainsi affiché et serve de règle pour tous les tribunaux depuis le Sénat jusqu’au tribunal le plus inférieur.

Vous avez peine, Sire, à croire à la vérité de tous ces faits. Mais daignez Vous souvenir de la plainte que le Ministre de l’intérieur porta au mois de juin à V. M. au nom de Magistrat de Dorpat contre nous relativement au terrain de l’Université6. D’après cette plainte nous sommes des ravisseurs, des brigands qui nous sommes emparés à main armée du bien des paisibles bourgeois de Dorpat. Vous ordonnâtes que le terrain soit mesuré. Il l’a été, et j’ai depuis hier sous les yeux la déclaration formelle du Magistrat que l’Université n’a aucunement reculé les bornes de ce que la Couronne lui a donné, et des preuves claires que le Magistrat connaissait alors notre innocence aussi bien qu’aujourd’hui!

Sire, voilà un nouvel exemple des iniquités auxquelles on se prête pour perdre dans Votre esprit un Institut qui dès sa naissance a marqué chaque instant de son existence par son activité pour le bien public. Sire! que ne pouvez-Vous voir notre situation! Après avoir y refusé toute rétribution pour les travaux extraordinaires dont nous nous sommes chargés pour l’Université et les écoles, après avoir sacrifié travaux et veilles à surpasser nos devoirs (il est 3 heures après minuit en ce moment) nous sommes bafoués d’une partie du public, insultés par les particuliers, tournés en dérision par les tribunaux à qui nous demandons justice, et quand la légèreté de nos étudiants provoqués offense un membre de la caste privilégiée, toutes les autorités prennent fait et cause pour lui et l’on fait Haro sur nous de tous côtés.

Sire, cette affaire décidera si Vous avez une université à Dorpat ou non7. Notre état est insupportable. Il ne peut durer tel. O combien de choses je devrais encore Vous dire, surtout sur l’objet des écoles! Mais la longueur de cette lettre m’effraie moi-même. Veuillez Vous souvenir des points principaux que j’ai indiqués dans mes lettres précédentes touchant la culture en général de Votre nation. Que de travail à faire! Et que fera-t-on si notre Université succombe? Qui aura le courage de travailler après nous si nous sommes la victime de l’aristocratie? Quant à moi, je le suis déjà; ma santé a fléchi. Mais au moins que ce ne soit pas en vain, et tirez, ô monarque chéri, de ce sacrifice tout l’avantage possible pour Votre peuple.


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