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Автор книги: Андрей Андреев


Жанр: Зарубежная образовательная литература, Наука и Образование


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Публикация оригинальных текстов на французском языке

Данное электронное издание служит дополнением к основному тому книги «Кафедра и трон: переписка императора Александра I и профессора Г. Ф. Паррота» (М: Новое Литературное Обозрение, 2023), вышедшему на русском языке. Там опубликованы обширные исследовательские очерки об издаваемой переписке, ее перевод на русский язык, комментарии, аннотированные указатели имен и географических названий. Сноски в данном издании, отмеченные цифрами, отсылают к комментариям в основном томе.


La présente édition électronique constitue un complément au volume principal de l’ouvrage La chaire et le trône: correspondance entre l’empereur Alexandre Ier et le professeur George-Frédéric Parrot (Novoïé litératournoïé obozrénié, Moscou, 2023) paru en russe, et qui présente une étude de cette correspondance, sa traduction en russe, des commentaires et des index annotés des noms de personnes et de lieux. Les notes de la présente édition signalées par des nombres renvoient aux commentaires du volume principal.


Andreï ANDREÏEV

La chaire et le trône: correspondance entre l’empereur Alexandre Ier et le professeur George-Frédéric Parrot / lettres traduites du français par Vera Miltchina. – Moscou: Novoïé litératournoïé obozrénié, 2023. (Archivalia Rossica)


George-Frédéric PARROT (1767–1852), professeur de physique à l’université de Dorpat, est entré dans l’histoire non seulement comme scientifique, mais aussi comme interlocuteur et ami de l’empereur Alexandre Ier. Leur correspondance est un exemple rare d’amitié et de confiance entre un souverain autocratique et un de ses sujets qui s’intéresse sincèrement aux améliorations dans le pays. En échange de sa loyauté sans bornes, Alexandre Ier confiait à Parrot d’importants secrets d’État, par exemple son intention de doter la Russie d’une constitution, ou le sort de Speranski, accusé de trahison. L’ouvrage de l’historien Andreï ANDREÏEV présente pour la première fois les textes de plus de 200 lettres, originales (jointes sous forme électronique) et traduites du français en russe, accompagnées de commentaires détaillés et d’index annotés. La publication des lettres est précédée d’une importante étude historique sur les relations entre Alexandre Ier et Parrot et sur la destinée de leur correspondance, qui apporte un éclairage nouveau sur l’histoire de la Russie du début du XIXe siècle.

Andreï ANDREÏEV est docteur en histoire et professeur au département d’histoire russe du XIXe siècle et du début du XXe siècle de la faculté d’histoire de l’université d’État Lomonossov de Moscou.

1. G. F. Parrot à Alexandre IER

Discours tenu à l’Empereur Alexandre I à son premier passage par Dorpat

[Dorpat, 22 mai 1802]


Sire!

Vous venez d’entendre les acclamations de Votre peuple, ces acclamations si sincères, si vraies, qui ne se font entendre qu’aux Monarques chéris. Vous en êtes profondement touché; Votre grand cœur éprouve en ce moment la plus douce des jouissances, la certitude que Vous faites réellement tout le bien, que Vous voulez faire, et ces cris de joie et ces preuves de notre amour ne sont qu’un échantillon de ce qui se passera dans chaque province que V. M. honorera de sa présence. Sire, transportez-Vous en idée sur chaque point de Votre vaste Empire, voyez en cet instant tout Votre peuple à Vos pieds, voyez chacun de Vos sujets Vous remercier pour un bienfait particulier. Le possesseur des terres de cette province Vous est redevable de la diminution des impôts, l’homme de lettres du rétablissement de la littérature, le négociant de la liberté du commerce, l’artisan du réveil de l’industrie, le cultivateur – le cultivateur à qui le système féodal n’a presque laissé qu’une existence précaire – Sire, Vous, Vous ne le méprisez pas, une puissance invisible lui a trahi le secret de Votre cœur: déjà le père de famille jette le premier coup d’œil serein sur ses enfants. Jouissez, Sire, de ces beaux fruits de Vos soins, de Vos veilles, de Votre amour; savourez la jouissance de faire tout notre bonheur.

Sire, que ces grandes idées, ces augustes sentiments Vous occupent tout entier, trop fortement entrainée elle-même dans le torrent de la reconnaissance publique, l’académie, Sire, qui doit son existence à Vos soins paternels, n’entreprend pas de faire éclater aujourd’hui d’une manière particulière la profonde gratitude dont elle est pénétrée, ou de fixer les augustes regards de V. M. sur les prémices de ses travaux, mais elle espère, elle ose aux moins désirer que V. M. veuille bien lui accorder cette grâce à autre occasion. Si d’un côté la médiocrité de la sphère actuelle de son activité semble en quelque sorte lui ôter le droit d’aspirer à une faveur particulière, d’un autre côté elle se souvient du but de son existence – et ce but est grand et par là même cher à V. M.

Nous ne comptons, il est vrai, encore que par jours la durée de notre existence; mais que n’avez Vous été présent, Sire, au jour de notre installation1, au moment où nous jurâmes à l’autel de la divinité l’obéissance à la plus sainte de ses lois et à V. M. la soumission à sa volonté la plus décidée, cette de consacrer toutes nos forces au bien de l’humanité. Mais qui nous empêche, de répéter dans ce lieu même ce moment auguste? Amis! Confrères! et vous, qui présidez à nos travaux2, répétons le. Qu’Alexandre soit témoin de nos vœux solennels!

Dieu suprême! Nous jurons en ta présence, en présence de ton image chérie, de consacrer nos veilles et nos talents à l’emploi, que tu nous as confié; de travailler avec zèle et fidélité à répandre des lumières utiles. Nous jurons de respecter l’humanité dans toutes les classes et sous toutes les formes; de ne distinguer le pauvre du riche, le faible du puissant que pour vouer au pauvre et au faible un intérêt plus actif et plus tendre. Nous jurons que chaque action de notre Monarque, chaque bienfait, qu’il répandra sur son peuple, nous rappellera la sainteté de nos dévoirs.

Sire, recevez ces serments, ils sont sincères, ils sont purs, comme le vœu que Vous avez fait de rendre Vos sujets heureux3.

2. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat, 11 août 1802]


Sire,

La faculté de philosophie de l’Université de Dorpat m’a chargé en ma qualité de chef de cette Académie de faire parvenir à V. M. I. l’examen de l’ouvrage intitulé «Versuch eines Entwurfs zu einer in Livland zu errichtenden Universität»1, que Vous avez confié à ses lumières et à son intégrité. Cet instant qui me transporte en idée aux pieds de Votre auguste trône est, Sire, le plus beau de ma vie, sans en excepter même celui où j’eus le bonheur de Vous offrir de bouche l’hommage et les vœux de notre Académie. Cet examen contient la défense des droits sacrés de l’humanité qu’un savant allemand a osé méconnaître même en s’adressant à V. M. Non, Sire, Vous ne pouvez nous honorer davantage qu’en nous confiant cet examen. Toutes les grâces, toutes des distinctions dont le Monarque de la Russie pourrait combler notre institut naissant, ne peuvent balancer l’honneur que nous témoigne Alexandre en nous interrogeant sur les objets les plus importants à l’humanité. Nous avons taché de répondre à cette confiance en traitant les différents sujets de l’ouvrage allemand avec véracité et impartialité. Recevez, Sire, ce premier fruit de nos travaux extraordinaires avec cette bienveillance qui Vous a gagné le cœur de chacun de nous; recevez le non seulement comme l’effet de notre obéissance, mais comme la preuve la plus authentique que nous comptons sur Vos vertus. Qu’il devienne un lien nouveau entre V. M. et nous, un lien sublime inconnu jusqu’ici entre le Monarque et ses sujets! En Vous rapprochant ainsi de Vos sujets les plus fidèles Vous fondez, Sire, un nouveau Empire dont les limites dépasseront les bornes de la vaste Russie. Vous travaillez pour toute l’humanité, et Vous Vous trouverez un jour, sans conquêtes et sans ambition, à la tête du genre humain. Heureux Monarque! En Vous ralliant à l’humanité Vous avez trouvé le secret des grands rois. Jouissez Votre bonheur! Jouissez en longtemps, Sire, et daignez quelque fois Vous ressouvenir qu’à une extrémité de Vos États il est une petite société d’hommes qui applaudit avec un zèle sans bornes à Vos triomphes, qui ne cesse de faire pour Votre auguste personne les vœux les plus ardents et qui attend de la continuation de Votre bienveillance particulière son lustre et son activité.

Interprète assurément trop faible de ces sentiments de mes confrères, oserais-je parler de mes sentiments particuliers pour V. M., de cet amour sans borne que Votre haut rang me défend peut-être, mais dont mon cœur ne peut se défendre?

Parrot,

Prorecteur2

3. Alexandre IER à G. F. Parrot

Saint-Pétersbourg, 24 août 1802


Monsieur le Prorecteur de l’université de Dorpat!

Le rapport, que Vous m’avez présenté au nom de la Faculté de Philosophie sur le travail, dont je l’ai chargée, est rempli d’idées aussi lumineuses, que bienfaisantes. C’est une grande satisfaction pour moi de voir cette Institution naissante se proposer, dès son origine, un but aussi noble, que celui d’influer sur le bien-être de la société par le sage emploi des lumières. Portez aux membres de l’Université l’expression de ma reconnaissance et recevez, comme son digne Chef, la part, qui Vous en est due.

Alexandre

4. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat, 30 août 1802]1


Sire,

Permettez que je mette aux pieds de V. M. I. deux petits ouvrages d’occasion, trop peu dignes il est vrai de paraître publiquement sous auspices immédiats, mais qui peut-être Vous intéresseront, Sire, par quelque côté. Mon discours à l’avènement au Prorectorat est une esquisse fidèle de nos principes vis-à-vis du public et de nos étudiants2. L’autre ouvrage est une dissertation (pro loco) que je défendrai aujourd’hui publiquement3. L’académie a cru ne pouvoir mieux célébrer ce jour qui nous est si précieux que par un acte qui atteste en public que nous tâchons de nous rendre dignes de la haute bienveillance dont V. M. I. nous honorer.

Je désirerais infiniment que V. M. trouvât un intérêt particulier en dernier article de ma dissertation, article qui a les chemises de laine par objet. Permettez, Sire, que je Vous en offre une traduction. J’ai appris il y a quelques mois par le Comte de Mannteuffel que Vous portez habituellement [un mot est abîmé] chemises, et je cherchai dès lors une occasion favorable de communiquer à V. M. une façon de penser là-dessous. Sire, veillez ne reconnaître dans cette démarche que le désir si vif, si vrai, que j’ai de prolonger votre précieuse vie. Que ne pouvez-Vous lire en cet instant dans le fond de mon cœur!

Persuadé que les chemises de flanelle sont un poison lent je conseille, en physicien et d’après l’épreuve que j’en ai faite sur moi-même et sur d’autres, d’en abolir l’usage; et pour ne pas occasionner un changement trop brusque dans la manière d’être de la peau, je propose de lui substituer pour quelque temps une espèce de tricot de laine à très grosses mailles, dont j’ai l’honneur d’envoyer à V. M. I. un échantillon fait de la main de ma femme. Elle eût désiré, Sire, oser Vous offrir une veste entière de ce tricot, mais elle a jugé devoir réserver à la tendresse de S. M. Impératrice les délices de contribuer par son propre travail à la conservation de Votre santé, persuadée en outre qu’un remède provenant d’une main aussi chère et aussi aimable aura un effet doublement bienfaisant.

Je ne puis, Sire, terminer cette lettre, sans prendre la liberté de dire combien celle, dont Vous avez honoré l’académie et moi, nous a touchés. N’attendez pas les remerciements ordinaires de notre part. Nous ne saurions quelle forme leur donner. Vous avez compris le Vœu de nos cœurs – en tout point. Vous savez nous honorer de la manière qui nous est le plus agréable, et nous voyons avec ravissement le sort des nations en Vos mains. – Vous daignez en quelque sorte nous associer à Vos travaux. Sire! je Vous jure que nous nous rendons dignes de cet honneur. – Mais notre activité est resserrée; notre constitution a des défauts considérables qui mettent des entraves à notre bonne volonté et vont jusqu’à interposer de grands difficultés au complètement du nombre de nos professeurs4; car décidés à n’admettre aucun sujet médiocre, nous recevons à tout moment des refus de la part des hommes de mérite dont les circonstances d’ailleurs devraient leur faire désirer une place parmi nous. Ces refus nous sont douloureux et joints à l’imperfection de notre institut naissant, ils jettent un jour défavorable sur nous. Oserais-je, Sire, Vous supplier de faire venir quelqu’un de nos professeurs à Pétersbourg, et nous accorder la grâce de traiter ce sujet de bouche avec V. M. I.? Nous croyons ne pouvoir confier l’examen de ces détails si importants et si délicats qu’aux sentiments vraiment humains de V. M., qui sûrement ne veut pas que nous soyons condamné à une médiocrité, qui rabaisse notre université si fort au-dessous de celles d’Allemagne, et qui menace de paralyser nous efforts pour le but que les lumières et le cœur de V. M. nous a fait un devoir d’atteindre.

Parrot,

Prorecteur

Annexe

Observations sur les chemises de laine


L’expérience ayant fait voir que les chemises de laine produisent des effets salutaires dans les maladies séméiotiques de la peau, on a supposé à cette espèce de médecine des vertus particulières, et conseillé leur usage même dans le temps de santé. Cette usage recommandé par un médecin comme Hufeland qui surtout a écrit pour toutes les espèces de lecteurs, ne pouvait que se généraliser.

Malheureusement l’expérience a fait voir que l’usage habituel de ces chemises est nuisible, surtout aux personnes dont l’organisation est moins active (qui ont moins de force vitale dans la langue des médecins), aux personnes qui ont un tempérament vif et dont la vie est sédentaire, en général à tout être organisé qui a une peau destinée à remplir ses fonctions au moyen de l’action de l’air atmosphérique.

Cette contradiction, entre les conseils de plusieurs médecins d’ailleurs respectables et l’effet, est aisée à lever, aussitôt qu’on pose des principes de saine physique pour base.

On croit l’usage des chemises de laine utile par les raisons suivantes:

a) Elle tiennent chaud, étant un tissu qui résiste davantage au passage de la chaleur animale. – Soit; mais comme telles elles feront leur effet aussi parfaitement en guise de veste par-dessus la chemise de lin.

b) Elle sert d’incitement pour la peau, en ce qu’elle produit par son frottement de l’électricité à la surface du corps humain. – Fort bien, et à cet égard peut-être la laine remplace l’effet de l’air qui produit aussi de l’électricité sur la peau, non par frottement, mais par sa décomposition, qui, comme je l’ai prouvé dans ma dissertation, est la source de tous les mouvements dans l’organisation animale. Je dis peut-être, parce qu’il n’est pas encore décidé que l’électricité que laine produit par son frottement sur la peau soit la même que celle que l’air produit. En outre cet effet de la laine est ordinairement beaucoup trop violent, ce qui se prouve principalement par les cures de rhumatisme qu’on opère par elle. Devons-nous être traités toute notre vie comme si nous avons des rhumatismes?

c) La laine, à ce qu’on dit, offre un passage plus aisé aux vapeurs transpirées, en ce que les étoffes qu’on en compose ont des pores plus larges que ceux de la toile. – D’abord il est à remarquer que la largeur des interclous dans les différents tissus est relative. Si la santé en dépend, n’est-on pas maître de faire des chemises de gaze si l’on veut? D’un autre côté on peut observer au premier coup d’œil que les fins poils des étoffes de laine ferment les interstices presque entièrement, en se feutrant les uns sur les autres, et laissant par là un passage moins libre aux vapeurs. Enfin on n’a envisagé ici le passage des vapeurs au travers des étoffes que sous le point de vue mécanique, en oubliant tout à fait le point de vue physique et chimique, qui dépend de l’attraction des parties qui doivent passer à la matiere du filtre, et de l’affinité des premières avec l’air ambiant. Une vessie, par exemple, pleine d’eau se vide petit à petit par l’évaporation, quoiqu’il soit impossible par des moyens mécaniques de faire passer de l’eau au travers de ses pores. Une gaze ne laisse pas passer de mercure à travers les interstices de son tissu à moins qu’on ne le presse, tandis que l’eau passe très facilement. La laine a la propriété d’avoir moins d’attraction absolue pour les matières aqueuses et grasses que le lin; mais lorsqu’elle en est une fois pénétrée elle les perd aussi plus difficilement, à cause de sa texture feutrée. Un morceau de flanelle se mouille moins facilement qu’un linge et sèche plus lentement.

Donc les tissus de laine sont moins propres à laisser passer les matières de la transpiration qui sont de nature aqueuse, en ce qu’ils s’en chargent et déchargent plus difficilement. L’expérience est parfaitement conforme à ces principes. J’ai généralement observé que la sueur attache à la surface intérieure des chemises de laine en abondance. Ou bien elle se dissémine sur la peau et forme comme une espèce d’enveloppe par-dessus l’épiderme qui arrête la transpiration et intercepte l’action de l’air. L’effet qui en résulte, conformément à l’expérience, est que la matière de la transpiration reste plus longtemps à la surface de la peau, qui l’absorbe et amasse par là des principes cachés de maladies et surtout de rhumatisme.

Enfin les étoffes de laine, en vertu de leur texture feutrée, interceptent l’action de l’air sur la peau. Or il est démontré que cette action est en partie le principe de la plupart des procès vitaux, surtout de la production de la chaleur animale et de la circulation du sang. Toute augmentation d’habillements, surtout d’une pareille contexture, ralentit donc le procès de la vitalité, affaiblit par conséquent ce qu’on appelle ordinairement les forces corporelles et dispose le corps humain à céder aux attaques des maladies, c’est-à-dire affaiblit la santé. Aussi voit-on ordinairement que les personnes qui portent les chemises de laine, loin de se préserver par là du froid, deviennent frileuses, sont sujettes aux rhumatismes et à un malaise général, effets qui cessent pour la plupart dès qu’on quitte ces chemises.

La conclusion générale que l’on doit tirer de ces principes est que, sans ôter aux chemises de laine le mérite de rétablir l’action de la peau par un incitement favorable de quelques heures ou au plus quelques jours, lorsque cette action a été affaiblie par une espèce de paralysation de cet organe, leur usage habituel est un poison lent dont on ne peut se défaire trop tôt.

Ordinairement on craint par ce changement de s’exposer à des rhumatismes. D’après l’expérience que j’en ai faite sur moi-même je pourrais regarder cette crainte comme superflue. Mais il est deux moyens de l’éluder. Le 1er est d’opérer le changement dans la belle saison, vu des habillements moins épais laissant un accès plus libre à l’air dont l’action unique répare de reste le frottement de la laine. Le second moyen consiste à passer au changement par un intermédiaire qui consiste en un tricot de laine à très larges mailles qui opère en partie le frottement de la flanelle et laisse une influence libre à l’air; un usage de quelques semaines jusqu’à quelques mois d’une veste de ce tricot [plusieurs mots sont abîmés] les suites qui pourraient provenir d’un changement subit. L’expérience a déjà décidé en faveur de ces tricots.

5. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg, 13 octobre 1802]1


Sire,

Vous aimez les lettres. Vous êtes persuadés de leur importance pour la culture de l’humanité, de leur influence sur le bonheur des nations. C’est sur ce principe que V. M. I. a voulu ériger l’Université de Dorpat et ce n’est que sur ce principe que sa constitution devait être fondée. En la considérant sur ce point de vue nous la trouvons affecté de défauts nombreux et importants, extérieurs à la sanction de V. M. D’abord nous n’avons pas d’acte de fondation. Une simple confirmation d’un plan proposé dans un temps et sous des circonstances où il était impossible de lui donner un certain degré de perfection2, est le seul boulevard de notre existence pour l’avenir; les revenus de tout l’institut sont si modiques, que s’ils restent tels, nous sommes éternellement condamnées à une médiocrité qui paralyse notre désir d’être utile. D’un côté nous ne pouvons pas nous associer le nombre des professeurs nécessaires, et ceux que l’idée de contribuer efficacement au bien public a engagés à accepter des places de cette Université ne sont pas à l’abri du besoin; d’un autre côté nous manquons de revenus pour fournir à l’entretien de quantité d’établissements nécessaires de toute nécessité, sans lesquels nous sommes condamnés à une existence avilissante. Enfin nous n’avons pas de fonds pour subvenir aux besoins de pauvres étudiants dont le nombre s’accroit déjà et qu’il serait cruel d’éloigner ou d’abandonner à la misère. Nous avons déjà fait à cet égard tout ce qui était en notre pouvoir; nous leur donnons nos leçons gratis et rognons de nos minces revenus pour subvenir à leur plus passants besoins. Mais ces moyens s’évanouissent en comparaison de ce qui est à faire, il faut un revenu fixe destiné à cet objet. Sire! accordez-nous un revenu proportionné au but de notre Université et au désir ardent que nous avons d’être utiles. Ne souffrez pas que nous consumons en vains efforts initiaux et que nous nous sacrifions en pure perte. Nous le ferons si Vous le voulez. Que ne ferions-nous pas par amour pour notre devoir, par amour pour Vous? Mais Vos vues humaines seront manquées et cela même que Vous aviez destiné à les atteindre sera perdu. Notre institut n’est pas un objet de luxe. Vous connaissez, Sire, sa tendance, ses principes invariables. Il deviendra un monument éternel élevé à la raison, élevé par les moines d’un ami de l’humanité.

Pour donner à notre Université l’activité dont elle est susceptible, il faut qu’elle soit libre d’entraves et estimée du public par lequel elle doit influer. Elle doit donc avoir des droits et des prérogatives, à l’instar des autres parties intégrantes de l’État. À la tête de ces prérogatives est la juridiction civile, criminelle et de police3. Nous l’avons déjà en partie mais par là même l’université se trouve continuellement en prise avec les autres autorités, parce qu’il est impossible, surtout dans l’état actuel de la législation, de fixer les limites de ces trois espèces de juridiction.

Sire, si nous vivions dans cet âge heureux de l’espèce humaine où les vertus tiennent lieu de lois, nous ne réclamerions ni juridiction ni autorité. Mais que V. M. I. décide elle-même s’il est possible aujourd’hui de se faire estimer et porter uniquement par des vertus? Réduits à notre médiocrité présente nous consumerons notre temps et nos forces à repousser des attaques cyniques ou à découvrir des trames perfides, et l’expérience a prouvé dans les universités que la juridiction plénière sur leurs membres est le seul boulevard de leur sûreté. Aussi elles possèdent toutes cette prérogative, sans même en excepter l’ancienne université de Dorpat4. Et en cela elles ne sont pas plus privilégiées que les autres ordres de l’État qui ont également une juridiction particulière.

Persuadé, Sire, de l’équité de ces demandes, puisqu’elles sont fondées par les principes que V. M. a reconnus formellement dans la lettre à jamais mémorable dont Elle a honoré notre Académie, je prends la liberté de mettre à Vos pieds, en forme d’un acte de fondation, l’esquisse des droits que nous reclamons5. Si elle obtient l’approbation de V. M. I., je Vous supplierai, Sire, de me donner la commission d’en faire une traduction allemande et russe et de me permettre de Vous la présenter à signer, afin que je puisse m’en retourner bientôt répandre la joie dans notre académie qui n’a de désir que pour ses devoirs et de vœux que pour Votre personne sacrée.

Veillez, Sire, souscrire à notre prière. En la faisant, nous nous transportons aux pieds de Votre trône auguste. Quittez-le un instant en idée. Transportez-Vous au milieu de nous, jouissez en simple particulier, en homme, de toute la gratitude, de tout l’amour que Vous nous avez inspirés. Ces sentiments ne sont pas conditionnels: si une impérieuse nécessité Vous impose la triste devoir de nous refuser notre demande, Sire, ces sentiments nous resteront; Vous connaissez Votre cœur paternel qui souffrira de nos peines.

Recevez, Sire, l’hommage particulier des sentiments illimités de respect et d’amour dont je suis pénétré.


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